Bibérophilie - Saison 8 - 07 - Mars 2012

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1 - L'alimentation des prématurés

2 - L'objet du mois

3 - Le biberon de Mme Bres

4 - Nouvelles du site

5 - Ventes de janvier/février

Echanges - Collections - Liens - Archives - S8-07


1 - L'alimentation des "tout-tout-petits" par Angélique
 

Nous collectionnons ces petits récipients de verre et autres matières qui ont permis de nourrir les tout-petits... sachant téter. Certains bébés « tombent trop tôt du nid » ou naissent avec des malformations labiales (lèvres) et/ou palatine (palais), ce qui empêche le nouveau-né de téter correctement avec risque élevé de fausse route. En feuilletant mes ouvrages anciens sur l’alimentation du nourrisson, il y a très souvent à la fin du livre un petit chapitre sur la prise en charge du nouveau-né prématuré. Peu de détails pour la plupart car nous en sommes qu’aux balbutiements de la néonatologie, mais néanmoins intéressant : comment faire boire du lait à un (très) petit être humain qui n’a pas ou peu acquis des réflexes de succion dû à son immaturité neurologique. Les méthodes ont été diverses et certaines ont toujours cours aujourd’hui mais avec des matériaux « modernes » et si quelques une nous paraissent inadaptées, elles ont néanmoins le mérite d‘avoir sauvé des enfants.

« Il est si rare de voir un enfant dans la suite qui est véritablement né à sept mois, que de mille à peine s’en rencontre un seul qui échappe. »
Mauriceau
, 1721
.

Au milieu du 19ème s. à la Maternité de Paris, un enfant sur 19 naît prématurément, et ceux, dont la grossesse a été menée à terme, sont de poids et tailles inférieurs à la normale. La cause des accouchements précoces sont les conditions de vie des mères : la misère, les travaux à la manufacture, l’alcoolisme, les maladies pulmonaires, mais la syphilis se retrouve au 1er rang.

La néonatologie est une discipline qui a vu le jour dans les années 1850 : « comment protéger, sauver le petit d’homme venu au monde trop tôt ? ». Des hommes de sciences, affectés par la forte mortalité des enfants nés avant terme, vont effectués des travaux pour les alimenter. Avant le milieu du XIX è, tout enfant ayant des difficultés de nutrition était voué à une mort certaine. C’est à cette même période que la première couveuse va voir le jour, combinant ainsi alimentation et thermorégulation. Elle connaît depuis plus de cinq décennies un formidable essor, ses besoins s’adaptant au progrès techniques dont la médecine ne cesse de bénéficier.

 

On a mis en évidence dans les années 1890 la différence entre un enfant ayant le réflexe de succion mais trop faible pour s’alimenter et un enfant dont le stade d’immaturité neurologique ne lui permettait pas d’avoir ce réflexe.

La 1ère description de gavage date de 1852 , a été expérimentée par un certain Marchant (de Charenton), mais source non trouvée pour la méthode.

En 1853, un procédé du nom de « Henriette » (Dr Henriette, Bruxelles) a été utilisé jusque dans les années 1930. L’enfant tenu horizontalement, le lait était versé alternativement dans une narine puis l’autre à l’aide d’une cuillère dont l’extrémité comportait un petit goulot afin de faciliter l’écoulement du liquide. Le lait était entraîné par l’air de l’inspiration dans les fosses nasales, et provoquait dans le pharynx des mouvements de déglutition. Henriette remplaça plus tard sa cuillère contre une seringue ou un compte-gouttes. Ce procédé néanmoins délicat était très encourageant à ses débuts car il permis de sauver aussi des enfants atteints de brûlure du pharynx, de malformation bucco-pharyngée, muguet... Mais ce mode d’allaitement assez courant, avec l’inconvénient d’être à la portée de mains non expérimentées, provoquait parfois éternuements, toux et risquait de développer une broncho-pneumonie lorsqu’il y avait absence de déglutition.

Gavage par le nez à l’aide d’une cuillère. 1er tiers du 20ème s.

2° Un « biberon aérogène » a été mis au point fin 19ème s. (années 1890) pour alimenter les nourrissons ne pouvant téter. Le lait était éjecté dans la bouche de l’enfant à l’aide une pelote en caoutchouc adapté à l’un des orifices du biberon. La seule pression de cette boule, combinée avec le jeu d’une soupape disposée à l’extrémité du tube plongeur, suffisait à faire parvenir le lait à la bouche de l’enfant. L’injection du lait pouvait se faire aussi par les narines. Pas de gravure de ce biberon.

 
Biberon « Rémond » pour prématuré sachant téter. 1950.   Tétines pour prématurés. Angleterre. 1940-1960.

Procédé des deux cuillères : employé pour la 1ère fois par Mme Mirzayants (Marseille). Le principe consistait à introduire dans la bouche de l’enfant l’extrémité d’une petite cuillère que l’on maintenait en place légèrement inclinée, et, à l’aide d’une seconde cuillère, on versait dans la première, comme dans un petit entonnoir, la quantité de lait nécessaire pour le repas. Le lait, conduit par la première cuillère comme par une gouttière, arrivait jusqu’au pharynx qui, par action réflexe, se contractait. L’enfant faisait de petits mouvements de succion et de déglutition. Ce procédé, si commode soit-il, fut peu usité.

Des médecins américains ont préconisé d’utiliser des pipettes au lieu de cuillères dans les années 1940.

 

Pipette compte-goutte munie d’une poire en caoutchouc. 1er tiers du 20ème s.

 

Compte-goutte. Angleterre. 1970-1980.

L’utilisation d’une cuillère pour nourrir un enfant n’ayant pas la force de téter mais avec réflexes de déglutition s’est largement démocratisée durant un siècle (années 1850-1950).

 

Alimentation à la cuillère, USA 1940.

 

Cuillères dont l’extrémité permet une meilleure préhension buccale et réduit le diamètre du débit du lait.
Mais peut-être ces objets ont-ils aussi été utilisés pour le gavage par le nez.

4° Le gavage ou nutrition entérale telle que nous le connaissons aujourd’hui a été mise au point par Tarnier (chirurgien et obstétricien, inventeur des forceps !). Cette méthode de nutrition a été introduite à la Maternité le 22 mars 1884. Tarnier n’est pas l’inventeur du procédé de gavage mais l’a perfectionné et vulgarisé son emploi. « L’appareil de gavage se compose tout simplement d’une sonde en caoutchouc rouge identique à celle utilisée pour le gavage et lavage de l’estomac de l’adulte mais dont le diamètre est réduit, au bout de laquelle on ajoute une cupule de verre, type bout de sein artificiel, ou un petit entonnoir en verre gradué. » 15 à 20 cm de sonde était introduite dans l’oesophage du nourrisson, et le lait était versé ou injecté lentement à l’aide d’une seringue dans par son orifice. L’entretien du tube se faisait après chaque gavage par un trempage dans une solution d’acide borique.

 

 

Entonnoir gradué muni d’une sonde. Fin 19ème s.

 

Bout de sein en verre muni d’une sonde. Fin 19ème s.

 

Gavage à l’aide d’une sonde. Etats-Unis. 1940.

Les premières sondes utilisées n’avaient pas le diamètre d’aujourd’hui. La sonde était introduite par la bouche à chaque gavage, provoquant nausées et vomissements. Le passage répétitif d’une sonde dans l’œsophage provoque à très cours terme des lésions. Aucune mention à ce sujet n’est évoquée dans les ouvrages traitant de l’alimentation du prématuré. L’introduction de la sonde par le nez a été expérimentée mais très souvent impossible du fait de l’étroitesse de la cloison nasale. Avec l’apparition de nouveaux matériaux, le diamètre des sondes de gavage s’est considérablement réduit pour un plus grand confort des tout-petits.

Aujourd’hui, nous n’utilisons plus le terme « gavage », il a été remplacé par « nutrition entérale ».


2 - Le pod bronnek ou craule

Petit retour sur cet incontournable modèle utilisé dans les campagnes bretonnes entre le  XVIIIème et le début du XXème siècle. Charles Géniaux aborde cette petite cruche, communément appelée "Pod Bronnek" (pot-mamelle), sous l'appellation "Craule". L'auteur souligne également son utilisation tardive en évoquant la concurrence de Robert qui propose des modèles à long tuyaux jusqu'en 1910 et nourriciers jusque dans les années 1920.

Extrait :

"Le biberon breton était jadis un ustensile pittoresque et naïf. En faïence grossièrement décorée de fleurs bleues, rouges et jaunes, il affectait la forme d'une petite cruche, flanquée sur le côté d'une tubulure qu'on introduisait dans la bouche du bébé : on l'appelait « craule ». Le biberon Robert a remplacé ce récipient primitif, mais au fond des campagnes, l'on voit encore la craule en terre [...]"

Géniaux (Charles), "La Bretagne vivante", H. Champion, Paris, 1912

Pour une vue d'ensemble des modèles bretons (craules ou chevrettes) et le débat autour de leur utilisation pour l'élevage des enfants, je vous renvoie aux trois bulletins de la saison 1 (Bulletins 10 - 11 et 12), dans lesquels Eric P. nous fait part de ses connaissances sur le sujet. Vous y verrez également quelques belles images de modèles glanés ça et là... Ces biberons sont toujours très appréciés des collectionneurs et il est difficile de les trouver à moins de 200 ou 250 euros dans les ventes classiques.

Biberon dit "Pod bronnek" ou "Craule" en faïence de Quimper
Vase ovoïde sur piédouche pourvu d'une ouverture supérieure à petit goulot droit. Anse latérale et bec. Décor floral et filets polychromes.

         

Signature : HR

Fin XIXème siècle

Un modèle similaire est répertorié dans "Les biberons du docteur Dufour" (se reporter à la bibliographie) - N° inventaire : FEC. 1085

 

 

Signature : HR Quimper

Fin XIXème siècle - Début XXème

Un modèle similaire est répertorié dans "Les biberons du docteur Dufour" (se reporter à la bibliographie) - N° inventaire : FEC. 1088

       
 

Paul Gauguin, "Nature morte au biberon en faïence de Quimper", 1889

   
 

Un peu d'histoire...

Dès la fin du 17° siècle, Quimper et ses alentours se spécialisaient dans la production de vaisselle. Des ustensiles pratiques et rustiques des débuts de grès et de terre cuite, on est passé peu à peu à des pièces plus raffinées, d'abord avec des copies de faïences de Nevers (qui elles-mêmes copiaient les faïences de Delft avant de se distinguer...), puis avec l'élaboration de dessins traditionnels : les personnages bretons en costumes de face ou de profil, les fougères et les grands motifs fleuris réalisés d'un trait de pinceau adroit par les "peinteurs" et les "peinteuses"...

A la fin du XIXème, trois grandes maisons émergeaient : HB (la Hubaudière), HR (Henriot) et Porquier, la plus renommée étant sans conteste HB. D'ailleurs, dans le musée, une reproduction d'un arrêt de tribunal de 1904 fait sourire aujourd'hui : on y interdisait formellement à la manufacture HR de signer ses pièces avec la barre du "R" recourbée comme la boucle d'un "B" qui serait mal fini... ce stratagème ayant pour but de créer une confusion !

En 1904, Porquier ferme ses portes. En 1913, HR (Henriot) rachètera la marque, avec les dessins et modèles et en 1918 HB (la Hubaudière) rachète les locaux pour s'y installer. Les deux entreprises continuent de se concurrencer jusqu'en 1968, date à laquelle HR (Henriot) éprouve des difficultés, et est absorbée par HB (la Hubaudière) : il reste une entreprise désormais soudée qui exploite les trois marques. En 1984, l'entreprise est vendue à la société "Quimper Faïence Inc.", sauf la collection (2400 pièces) et la bibliothèque (260 ouvrages) qui seront désormais gérés par une nouvelle société : "Faïencerie de la Grande Maison".

Texte extrait du site : Les Faïenceries de Quimper et le Musée de la Faïence


3 - Le biberon de Mme Bres
 

Le 30 mai 1877, Mme Brès dépose un brevet pour un nouveau biberon dit "régulateur". Ce biberon, dont on peut lire la description ci-dessous, s'apparente aux modèles à longs tuyaux en vogue à l'époque, ce qui, pour une femme médecin, est pour le moins singulier...

 

 

Biographie

Première femme française à devenir médecin, Madeleine Bres (née Gebelin) est la fille d'un fabricant de charrettes. C'est en suivant son père, appelé à travailler à l'hôpital de Nîmes, qu'elle découvre sa vocation pour la médecine et cela dès l'âge de huit ans. Une religieuse la prend en affection et lui confie quelques interventions mineures, comme la préparation de tisanes et de cataplasmes.

Comme il était de coutume à l'époque, elle est mariée très jeune, à quinze ans, et prend ainsi le nom de Brès.

En 1866, elle se présente devant le doyen de la Faculté de médecine de Paris, Charles Adolphe Wurtz, et lui demande son autorisation pour s'inscrire en médecine. Ce dernier lui déclare qu'il le fera, mais à condition qu'elle ait son baccalauréat, ce qu'elle obtient trois ans plus tard. Toutes les obtentions de diplôme devaient avoir le consentement du mari, les femmes mariées étant jugées irresponsables par le droit français de l'époque.

Son inscription à la Faculté de médecine est tout un symbole et il faut le soutien de l'impératrice Eugénie et du ministre de l'instruction publique, Victor Duruy, pour qu'elle l'obtienne.

En pleine guerre franco-allemande, tout en étant la veuve et mère de trois enfants, elle officie comme interne à l'hôpital de la Pitié. Le 3 juin 1875, alors âgée de 33 ans, elle obtient son diplôme de docteur en médecine avec la mention très bien, après avoir la soutenance de sa thèse, supervisée par le Charles Adolphe Wurtz, sur l'allaitement, intitulée, "De la mamelle et de l'allaitement". Cette thèse s'inscrit dans sa volonté de se spécialiser dans tout ce qui touche la relation entre la mère et son bébé, ainsi que l'hygiène des jeunes enfants. Elle n'est pas la première femme à obtenir le diplôme de médecin en France, l'Anglaise Elizabeth Garrett Anderson l'a devancée de cinq ans, mais elle reste la première Française.

Durant sa carrière, elle officie comme professeur d'hygiène et enseigne notamment aux directrices des écoles maternelles de la ville de Paris. Elle dirige le journal Hygiène de la femme et de l'enfant et elle est l'auteur de plusieurs livres de puériculture. En mission pour le ministre de l'Intérieur, elle part en Suisse étudier l'organisation et le fonctionnement des crèches. Le 28 mai 1893, la première crèche est inaugurée par Théophile Roussel, rue Nollet, dans le quartier des Batignolles.

Elle meurt à l'âge de 79 ans, dans la pauvreté

D'après Wikipédia

Madeleine Brès Gebelin présentant sa thèse "De la mamelle et de l'allaitement" le 3 juin 1875

 

Biographie complète - Télécharger la thèse

 


4 - Nouvelles du site
 

Tasse à nourrisson en étain à prise plate ajourée.

Merci Lili !!!!

  Poinçon de maître (?) : DENT
Poinçon de contrôle : X couronné
Poinçon de propriété : FH 1800

FH pour Foundling Hospital - Vers 1800

L : 100 mm (130 mm avec anse) - H : 25 mm

Modèles produits à l’origine pour amasser des fonds* pour l'Hôpital des enfants trouvés de Londres (Foundling Hospital), créé par Thomas Coram en 1737 et ouvert en 1741.

* D'après BENNION (Elisabeth), "Antique Medical Instruments", Sotheby Parke Bernet, London, 1979, page 270


Biberon Rémond Prématuré inscrit dans la masse, Centimètres Cubes avec graduations (5-55) et Onces (1/2-2).

H : 110 mm

Rare modèle pour prématuré de la marque Rémond, ce biberon reprend la silhouette des Pyrex des années 1930 avec un goulot resserré.

 

Biberon Rémond pour prématuré en verre moulé de forme cylindrique droite à goulot resserré.

Un exemplaire disponible à la vente (ou à l'échange) : ici

   

Artisanat XIXe

Date Type Marque - Modèle Plus value / moins value Prix
03/01/2012 Canrd à long bec en étain P.M. Anteaume Poinçons - XVIIIème 258,00 €
09/01/2012 Biberon conique à embout d'étain     163,00 €
09/01/2012 Biberon (?) en laiton   cf. bulletin octobre 2010 165,00 €
16/02/2012 Biberon limande sans bec     28,50 €
16/02/2012 Biberon limande sans bec   Eclat 25,50 €
26/02/2012 Biberon balustre en étain   Ouverture centrale 229,50 €

Verre industriel XIXe - XXe

Date Type Marque - Modèle Plus value / moins value Prix
07/01/2012 Biberon méplat à pans E.L (E. Lothon)   42,00 €
08/01/2012 Biberon méplat à pans J.G. (Grandjean) Modèle à bouchon vissé 37,00 €
09/01/2012 Biberon nourricer Leplanquais-C. Paul   27,00 €
23/01/2012 Biberon méplat à pans Robert A soupape originel 1869 87,00 €
27/01/2012 Biberon méplat à pans G&W Paris A système tube bois articulé 91,00 €
16/02/2012 Biberon méplat à pans Château (?) Marque non nominative 22,50 €
23/02/2012 Lot 2 biberons nourriciers Robert Perf. / PN   27,50 €
26/02/2012 Biberon nourricer Parfait nourricier  + notice 35,00 €

Moulés et sérigraphiés XXe

Date Type Marque - Modèle Plus value / moins value Prix
22/01/2012 Biberon sérigraphié à vis bakélite Guigoz Neuf sous film + notrice 21,00 €
26/02/2012 Biberon sérigraphié à vis bakélite Guigoz Neuf sous film + notrice 16,00 €

Documents et divers

Date Type Marque - Modèle Plus value / moins value Prix
23/01/2012 Tire-lait boule en verre soufflé     17,00 €

A bientôt

LudoGrid

postmaster@histoire-du-biberon.com